Saturday, November 07, 2015

JOEL ROBUCHON P I A N O

La leçon de piano de Joël Robuchon
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Par Stéphane Durand-Souffland  Publié le 07/11/2015 à 07:00
 Le chef Joël Robuchon dans son restaurant, la Grande Maison, en avril 2015.
Son restaurant bordelais fête sa première année. La carte décline classiques et audaces, avec une maîtrise absolue.


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Avec Joël Robuchon, c'est le cordeau et le renard: une gastronomie sous contrôle absolu, des assiettes sans faux pli, une technique jamais prise en défaut, le tout conjugué avec une carte gourmande et rusée. Le merlan Colbert s'y acoquine avec des spaghettis et œuf à la coque sans coque aux châtaignes de mer et à la truffe blanche, l'étuvée d'endives laurier-coriandre fraternise avec la poularde de Bresse en vessie, sauce ivoire truffée, l'île flottante tutoie la sphère de sucre soufflé à la mandarine, mousse de lait à la vanille de Tahiti.
On ne vient pas s'attabler à la Grande Maison, ouverte à Bordeaux depuis décembre 2014, en association avec Bernard Magrez - propriétaire de quatre crus classés dont le château Pape-Clément - pour se faire secouer par une cuisine de cascadeur, dîner à 200 à l'heure toutes fenêtres ouvertes. Non: on cherche ici, à l'écart de l'agitation citadine, dans ce qui fut l'hôtel particulier d'un éminent juriste bordelais, Léon Duguit, à se rassurer en révisant les classiques de la casserole mâtinés des trouvailles collectées par le maître aux quatre coins du globe et assagies au besoin par son interprétation - ce qui s'appelle aussi avoir un style. La vaisselle est ultracontemporaine, mais les nourritures restent intemporelles, le service tiré à quatre épingles. Un monumental chariot de pains permet de choisir celui ou ceux qui s'accommoderont le mieux avec les mets: le sur-mesure poussé à son paroxysme.
Mercredi dernier, un insolent soleil de novembre autorisait un déjeuner en terrasse, à l'abri d'un immense parasol gris perle, face à l'olivier bimillénaire qui se dresse au milieu de la cour d'honneur, massif et rassurant, tel un avatar végétal de Joël Robuchon. Un chat de gouttière noir et blanc vagabonde en s'étirant, c'est manifestement le plus plébéien des habitués de la Grande Maison.
Pour s'ouvrir les papilles, voici en amuse-bouche le caviar d'Aquitaine sur tourteau et infusion de corail anisée, qui figure sur le splendide menu à 275 € (eh, oui…). D'abord, la composition est saisissante de beauté: disque noir du caviar rehaussé par un éclat de feuille d'or, gelée de tourteau orange et translucide hérissée de sentinelles blanches et vertes. Sous les œufs d'esturgeon se cache un autre disque, de chair de crabe celui-là. En bouche, c'est un rêve portuaire, une invitation iodée à chercher le grand large. Les grains de caviar, fermes, éclatent contre le palais, tandis que la gelée délectable joue le contraste de la suavité, comme un baume marin.
Un festin paisible

À présent, un cèpe grillé, confit et escorté d'un caviar d'aubergine au cumin (43 €). Il arrive accompagné d'un bouillon parfumé au gingembre, «à boire comme un thé», qui transcende de manière spectaculaire une assiette superbe: cèpe émincé disposé en étoile avec une coiffe de dentelle d'aubergine. Le cumin transporte en Orient l'enfant du pays. Et ce bouillon - on retrouve l'idée avec d'autres plats -, quel délice! Une chaleur revigorante et digestive qui vous transperce.
On poursuit avec des ravioles truffées aux langoustines, étuvée de chou vert (80 €). Il y en a deux, comme autant d'iris dans une assiette en forme d'œil. C'est un classique du chef, qui concentre tout son art: on sait ce qu'on mange, c'est fort goûteux et pas évanescent, on reconnaît les saveurs, fussent-elles étroitement mêlées dans une manière de dim-sum habilement relevé.
Le homard grillé aux sucs de Château Chalon aux cèpes (65 €) se livre dans une bisque rouge, piqueté de légumes multicolores. Rien à dire, sauf que c'est tellement bon que l'assiette sera dûment saucée (merci le chariot à pains). Il y a aussi un pigeonneau à la broche aux feuilles de tilleul, céleri farci aux marrons, demi-glace végétale (59 €) qui vaut le détour, ne serait-ce que pour admirer le découpage de Jean-Paul Unzueta, le directeur, lequel vous débite l'oiseau avec une décontraction précise qui force l'admiration. Viande moelleuse, exactement saignante, surprise du marron planqué dans le céleri.
Le festival n'est pas terminé, car il reste les desserts (18 €), à la carte ou sur un autre chariot. Le chocolat tendance, crémeux au chocolat Araguani, sorbet cacao et biscuit Oréo, est à tomber en régression gourmande, avec son 45-tours de chocolat en guise de canotier. Idem avec le granité au rhum ambré surmonté d'une onctuosité aux fruits de la passion et d'une chantilly de haut vol. Du chariot tombe le coup de grâce, avec le saint-honoré à base de feuilletage aérien ou la tarte au chocolat tout simplement diabolique.
Un festin paisible, qui vous fera ronronner comme le chat de l'olivier.
La Grande Maison (Relais et Châteaux): 10, rue Labottière, 33000 Bordeaux. Tél.: 05 35 38 16 16. Menus à 98 € (végétarien sans gluten) ou 275 € (4 services, fromage et dessert). À la carte, environ 150 € hors boisson. Ouvert du mardi au dimanche.

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